Former au facteur humain pour renforcer la qualité des études de dangers

Depuis 2008, les exploitants d’ouvrages hydroélectriques ont l’obligation de produire des Etudes De Dangers (EDD) de leurs ouvrages. Ces études produisent une monographie pluridisciplinaire des agresseurs potentiels de l’ouvrage et des dangers auxquels celui-ci peut exposer les personnes, les biens et l’environnement.

Bien qu’extrêmement rares, les accidents majeurs de barrages révèlent à la fois la dangerosité de ces sites industriels d’apparence paisible et l’importance des facteurs organisationnels et humains dans la gestion de leur intégrité (Larouzée et al., 2014). C’est pourquoi l’arrêté ministériel de 2008 définissant le plan et les objectifs des EDD de barrages prévoit qu’elles intègrent une étude facteur humain.

De 2012 à 2015 une thèse CIFRE en collaboration entre le Centre d’Ingénierie Hydraulique (CIH) d’EDF et le CRC a conduit au développement de la méthode « ECHO » d’évaluation et de cotation des dimensions humaines et organisationnelles dans les EDD de barrages (Larouzée, 2015). Son développement a été pensé pour déclencher et accompagner un véritable changement de posture dans la prise en compte du facteur humain (d’une approche « négative » qui considère uniquement l’homme à travers la notion d’erreur à une « positive » qui valorise l’activité d’exploitation). En effet, le rôle de l’humain dans les systèmes industriels est essentiellement lié au contrôle des processus « normaux » voire à la maîtrise et correction d’anomalies ou de dérives. Les accidents sont rares ; lorsqu’ils surviennent, ils se révèlent généralement liés à une combinaison complexe de différents facteurs (techniques, humains et organisationnels, écosystémiques) et non à la seule « erreur humaine ».

Le souhait d’EDF-CIH est de produire des EDD capables de restituer au mieux la complexité des activités d’exploitation. Dès la phase préliminaire de collecte documentaire l’attention est portée à l’homme et à l’organisation du travail. Viennent ensuite les phases de visite de du site (ouvrage, usine, retenue) et de réunions d’analyses de risques où, en parallèle des considérations techniques, une réflexion spécifique est conduite sur l’environnement de travail et le contexte de réalisation des gestes d’exploitation. Pour cela, les pilotes-rédacteurs d’EDD sont chargés de stimuler et valoriser l’expression des exploitants sur leurs réalités opérationnelles et les conditions de réalisations de leurs activités.

La méthode ECHO est utilisée depuis 2015 dans les EDD de barrages d’EDF. Plus qu’un ensemble d’outils qu’il conviendrait de maîtriser, le projet-EDD a voulu s’assurer que les nouveaux ou futurs contributeurs au projet-EDD pourraient être formés à une approche « positive » du facteur humain pour devenir, à leur tour, des relais de cette évolution culturelle profonde. Le CRC a été sollicité pour mettre au point et dispenser une formation à la philosophie et l’utilisation d’ECHO. La première session de formation s’est déroulée à Toulouse le 21 février 2018. Animée par Justin Larouzée (CRC), elle constitué un moment privilégié d’échanges et de mises en situations permettant de déconstruire des idées reçues autour du facteur humain, encore trop souvent évoqué pour ses seuls aspects négatifs.

REFERENCES :

Larouzée, J., Duffaut, P., & Guarnieri, F. (2014). La catastrophe du barrage de Malpasset à l’épreuve des facteurs organisationnel et humain. In Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2014 (pp. 10-pages).

Larouzée, J. (2015). Théorie et pratique des modèles d’erreur humaine dans la sécurité des barrages hydroélectriques: le cas des études de dangers de barrages d’EDF (Doctoral dissertation, Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris).