Les récits du radeau de la Méduse

La revue Napoleonica publie en juin 2023 un article de Nebiha Guiga (Leibniz Zentrum de Berlin) et d’Aurélien Portelli (Mines Paris – PSL) intitulé « Les récits du radeau de la Méduse : l’histoire d’une situation extrême au prisme des violences et des sorties de guerre ».
Le 17 juin 1816, la frégate la Méduse s’échoue sur un banc de sable dans la baie d’Arguin au large de l’actuelle Mauritanie. Un grand radeau a été construit et 150 personnes montent à son bord. Il finit cependant par être abandonné par les canots qui le tiraient. Dans les jours qui suivirent, le radeau devient rapidement le théâtre de violences extrêmes. Pourquoi un tel déchaînement ? Pourquoi les survivants ont-ils recours au cannibalisme alors qu’ils ne sont pas encore en manque de nourriture et qu’il ne s’agit d’une question de vie ou de mort ? Avant même le naufrage, un conflit profond règne entre les passagers de la Méduse ; il est aussi féroce que celui qui fait rage dans la France de la Restauration. Le contexte extrême du désamarrage du radeau a conduit à un effondrement de ce que le philosophe Cornélius Castoriadis a appelé des « significations imaginaires ». Cet effondrement, allié au poids des traumatismes d’après-guerre résultant des conflits insurrectionnels de la Révolution et de l’Empire et à la perception d’une mort qui rôde a poussé les survivants à commettre les pires atrocités. Une étude attentive des récits des rescapés de la Méduse révèle à quel point, au-delà du choc du naufrage, le poids du passé et les ressentiments accumulés depuis le retour des Bourbons ont influencé les acteurs de la tragédie sur le radeau lui-même mais aussi dans leur récit rétrospectif de son déroulement.
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